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Le tourbillon est loin derrière...

19.05.2003

Le salstraumen est une impressionnante affaire! A notre arrivée dans les alentours, nous prenions de plus en plus de vitesse, passant de 3-4 noeuds, à 5, puis 6, voyant le gros du courant nous emporter sous le pont, en direction du courant. Mais nous savions qu'il y a une petite crique à tribord, abritée. Nous avons ramé vigoureusement pour l'atteindre et sortir du flux principal, ce qui s'est fait sans problème.

Dès notre arrivée, accueillis par un homme fort sympathique, un musicien qui vit juste à côté, nous partons faire des courses et nous mangeons un bon plat de spaguettis bolo, histoire d'avoir des forces pour aller jusqu'à Bodø.

Vu d'en haut, le tourbillon est impressionnant: multiples petites spirales mortelles qui feraient tourner le bateau en un rien de temps; ailleurs, de l'eau qui se fait propulser d'en dessous, des courants contraires qui se croisent. Le fjord se rétrécit passablement à cet endroit-là, alors que la quantité d'eau est la même. Ajoutez à cela plusieurs gros récifs au milieu du passage, et le résultat est garanti. Au plus fort du phénomène, qui suit la marée, le courant atteint 30 noeuds. A titre de comparaison, avec "Fenrir", nous n'avons jamais fait plus que 6,2 noeuds, sauf là. Au moment où tout est calme, le courant nous a quand même fait passer à 7,6 noeuds.

Flo était à bord, c'est dire si nous étions confiants dans le résultat. Pas que nous nous surestimons mais, informations prises auprès des autorités compétentes, nous savions le passage possible sans encombre. Ensuite, quelques heures de voile et une heure de rame, et nous nous amarions au port de Bodø, au son des hurlements d'un couple complètement ivre en train de se disputer. Des paroles, ils passent aux actes. Le sac à dos de l'homme passe au jus, des coups de part et d'autres... Pitoyable humanité! Merci le retour dans les zones soi-disant civilisées...

Mais notre quai est hors de portée. Si la distance qui nous en sépare est particulièrement courte, cent mètres peut-être, pour l'atteindre dans le labyrinthe des quais, il nous faudrait plus d'un kilomètre. Aussi nous déplions nos sacs de couchage et nous endormons sur le quai.

Quelques heures plus tard, nous sommes réveillés par la pluie, qui dure juste le temps de nous prouver la qualité de nos "sursacs" et de notre bâche. Même pas mouillés, d'abord! Au réveil, une petite mine... Mais le soleil revient promptement pour briller sur la fête nationale norvégienne.

Musique, et encore, et encore... Nous sommes vannés, mais contents d'avoir vu tous ces beaux costumes traditionnels. Une fois encore, les hommes n'assurent pas trop, habillés avec leur standard et hideux costume trois pièces, déguisés en présentateur télé ou en bussinessman moyen. Pourtant leur costume est, lui aussi, très beau. Vous les verrez bientôt en photo.

Une excellente rencontre débouche sur un bal folk: souper canadien, musiciens, danses en cercle ou en rond. On se serait cru à la maison. Leurs danses ressemblent vraiment beaucoup aux nôtres et nous avons pu nous joindre à la fête avec grand plaisir.

Le lendemain matin, notre première sortie en pleine mer avec "Fenrir", qui se comporte vraiment bien! Impressionnant comme ce petit tas de planches savamment assemblées permet de voguer sur les flots de l'Atlantique. Le vent est avec nous pour le moment, de même que pour les prochains jours; nous allons pouvoir faire de l'avance.

Cette nuit, nous avons dormi dans les Fleinvær, des îles sans arbres à cause du bétail qui y vivait jusqu'à il y a peu. Trouvant notre chemin dans le dédale de petits îlots et de récifs, nous accostons sur un petit ponton appartenant à Suzanne, la violonniste la plus réputée du nord de la Norvège. Elle est crevée par le concert donné la veille à Bodø; aussi nous faisons plutôt la connaissance de son mari, un peintre, qui nous installe dans le studio au-dessus de son atelier, avec une grande baie vitrée donnant sur "Fenrir" et le chenal que nous allons reprendre tout bientôt.

Vers minuit, le soleil était définitivement hors de vue, se terminant en long crépucule, qui se mélange à l'aube sans que la nuit n'ait eu le temps de s'installer. Pour suivre l'Etoile, nous regardons celle qui brille en nous, car voilà des semaines que nous n'en voyons plus d'autres .

Cap au sud et à bientôt.

 

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